Les fermes en Australie, ce que j’en aurais retenu
Ça y est, hier j’ai ENFIN fini mes mois de fermes pour mon visa ! Pour ceux qui ne sont pas au courant, afin d’avoir droit à une 2e année de visa en Australie il faut effectuer 3 mois de ferme (ou construction) dans certains codes postaux désignés (bien sûr au trou du cul du monde, ça serait pas drôle si on pouvait le faire proche d’une ville ou de la plage) pour avoir droit à une 3e année il faut refaire un autre 6 mois de ferme. Donc 9 mois au total (sauf qu’au final j’en aurais fait environ 11, car à cause du covid j’ai dû en faire plus pour survivre ici). Presque un an de ferme sur 2 ans passés en Australie, ça fait beaucoup ! De nombreux backpackers optent pour de la cueillette de fruits et légumes car c’est facile à trouver. Mais malheureusement bcp d’entre eux se font complètement exploiter par des fermiers sans scrupules et des salaires minables à la pièce. Cependant cette année avec covid presque tous les backpackers sont répartis et ils se rendent compte désormais à quel point ils ont besoin de nous car aucun australien ne veut faire ce genre de boulot et ils en sont déjà à plusieurs milliards de $ de perte à cause de ça….
Perso j’ai toujours refusé de faire du fruit picking, je voulais faire d’autres expériences plus intéressantes.
Ayant toujours rêvé de vivre la vie de cowboy j’ai commencé par travailler dans 2 ranchs (cattle stations, voir mon article désigné ici).
J’ai ensuite travaillé dans une ferme de moutons/vaches, une écurie de course, un élevage de quarter horses et un élevage de chevaux de courses (voir mon article sur le travail avec les chevaux ici). Des expériences très diverses qui n’auront pas toujours êtes faciles…
J’ai eu droit à des boss tyranniques, d’autres pervers narcissique ou encore machos. Beaucoup de fermiers traitent les backpackers comme de la merde et nous prennent pour des idiots sans chercher à nous connaître. Et pourtant j’en ai rencontré des backpackers ayant fait des hautes études, ingénieurs, juristes, de tout ! Mais tout le monde s’en fou de notre background, on est de la main d’oeuvre pas cher avant tout. Ça vous apprend l’humilité croyez moi … Je pense qu’une fois qu’on arrive à faire ce genre de boulots on peut faire n’importe quoi !
En plus d’étre dur mentalement, ce sont surtout des jobs ultra durs physiquement. J’ai bossé plus de 12h par jour régulièrement avec très peu de days off (mon maximum aura été un mois complet de job avec un seul jour off !), sous la pluie glaciale comme sous la chaleur étouffante du désert par plus de 42°C (en jeans et chemise bien sûr).
Dans le dernier job que je viens de finir je marchais tous les jours entre 18 et 26 km, tous les jours!!! De la folie. Et tout ça bien sûr en portant des charges lourdes de 20-30kg toute la journée. J’ai poussé mon corps jusqu’à ses limites physiques.
Je pensais savoir ce que c’était qu’être fatiguée quand tu reviens d’une rando de 20km ou autre. Mais ça n’a rien à voir… J’ai vraiment été au bord de l’épuisement plusieurs fois, mon corps m’a fait souffrir comme je ne savais pas que c’était possible, j’ai versé plusieurs fois des larmes d’épuisement ou de rage. Que personne n’ose jamais me dire que je ne sais pas ce que c’est que de travailler dur, car croyez moi, je sais !!
J’ai aussi risqué ma vie plusieurs fois que ce soit à cause de chevaux qui essayaient de me tuer, ou de taureaux sauvages ou encore d’accidents de tracteurs qui auraient pu être fatale…
J’ai aussi vu beaucoup de souffrance animale… J’ai vu des animaux mourir de faim et de soif, j’ai vu des vaches tellement maigres qu’on ne reconnaissait même plus que c’était une vache, juste un sac d’os avec un peu de cuir dessus. J’ai vu des vaches, chameaux et kangourous désespérés, mourir embourbés dans le dernier petit point d’eau au milieu du désert…
J’ai plusieurs fois êtes sous le choc et j’ai eu envie de pleurer comme la fois où on a dû abandonner dans le desert des vieilles vaches rachitiques car on n’avait pas la capacité matérielle de toutes les sauver alors il fallait faire un choix… tout en sachant qu’elles allaient mourir de soif car il n’y avait plus d’eau nul part…
J’ai aussi vu des castrations à vif, un coup de scalpel, pas d’anesthesiant, ni de désinfectant, rien. Le pire était le decornage (couper les cornes), les vaches hurlaient, ça pissait le sang, certaines se retrouvaient avec des trous dans le crâne et mouraient d’infections… J’ai aussi vu mes collègues abattre de nombreux animaux. Au fusil (le mieux) mais aussi à coup de couteaux ou à la masse dans la souffrance…
Le milieu des chevaux n’était pas vraiment mieux. Je n’aimais déjà pas bcp le monde des courses mais là j’en suis vaccinée à vie ! Des élevages intensifs, et puis on les traite comme de belles voitures de luxe, comme des objets. Ces chevaux n’ont aucun lien positif avec l’humain, que du négatif. On leur met un cavalier su le dos, il court 5min à toute vitesse sous le coup des cravaches puis il retourne enfermé dans un box, sans jamais avoir d’interaction sociale avec d’autres chevaux (alors que c’est un animal grégaire).
Tout ce qu’il connait de l’humain c’est la punition, on leur donne des coups dans la bouches avec leur mors et on les frappe car c’est la seule manière de les tenir tellement ils sont énervés (qui ne le serait pas à leur place), ils mordent, ils se cabrent, ils sont horribles, mais peut on leur rapprocher ? J’ai vu des chevaux sous sédatifs uniquement pour leur couper la crinière ou pour le maréchal ferrant car sans sédatifs ils sont incontrôlables… Et à côté de ça on nous oblige à leur apprendre à marcher en main super vite car ça rend bien pour la vente sauf que le pauvre cheval ne comprend pas ce qui lui arrive car on le force à marcher vite, ce qui n’est pas naturel, pour lui ça veut dire qu’il y a un danger, du coup bcp d’entre eux essayent de se cabrer et de s’enfuir et on doit leur donner des coups dans la bouche une fois encore pour les “calmer”… Ça n’a tlmt pas de sens…
J’ai aussi vu des gens payer des milliers de dollars pour avoir des poulains (des doses de sperme à 15000$ envoyé des USA, oui oui). Certain utilisent même des juments porteuses pour porter les poulains d’autres juments (belle prouesse scientifique pour le coup).
Sauf qu’une fois que ces juments porteuses deviennent trop vieille (une dizaine d’années, ce qui est même pas la moitié de vie d’un cheval), ils les envoient à l’abattoir sans même chercher d’autres alternatives… (Alors que ce sont des bons chevaux qui pourraient très bien être montés), quelle ironie…
Heureusement je ne retiens pas que du négatif non plus. J’ai eu aussi de très belles expériences comme pouvoir nourrir au biberon des dizaines de petits veaux adorables (et même un bébé chameau!), courser des chameaux sauvages dans le désert en 4×4, me retrouver nez à nez avec d’immenses taureaux en liberté, admirer d’innombrables levers et couchers de soleil (le point positif de bosser à 4h du mat!), rassembler des troupeaux gigantesques à cheval comme un vrai cowboy, ou en 4×4 avec les hélicoptères qui volent juste au dessus de nos têtes ! J’ai aussi joué avec plein de petits poulains adorables, j’en ai tenu dans mes bras pour des opérations, j’ai assisté à plusieurs chirurgies, manipulations d’embryologie, et autres soins vétérinaires. J’ai aussi rencontré des gens qui aiment vraiment leurs animaux et qui les respectent.
J’ai appris bcp de choses sur l’agriculture et particulièrement les vaches et les chevaux. Je sais aussi maintenant parfaitement conduire un quad, un bobcat, un 4×4, et un tracteur ^^ (on ne sait jamais, ça peut servir!) Et je suis plus débrouillarde, et bricoleuse.
Je n’ai aussi jamais gagné autant d’argent qu’en australie! Surtout dans mon premier ranch, je gagnais le triple de ce que je gagnais en travaillant en com dans le jeu vidéo au Canada… (Ça montre à quel point j’étais mal payée ou a quel point on est bien payé ici…).
J’ai aussi énormément appris sur moi même, mes limites physiques et mentales et sur le fait que j’apprécie tout de même beaucoup travailler au grand air.
Donc oui il y a eu beaucoup de négatif mais aussi du positif. Comme je le dis toujours toute expérience est bonne à prendre ! Il n’y a pas de sous-métier et ça nous apprend bcp que d’être capable de faire un travail complètement différent de ce qu’on a l’habitude de faire. Ce sont toutes tes expériences qui m’auront rendues plus forte et qui m’auront ouvert les yeux sur de nombreuses choses.
Mais oui, j’en aurai chier à finir ces 3+6mois de ferme !! Ça coûte au final très cher (pas en argent mais en sueur!) de réussir à rester plus longtemps en Australie ! Donc oui vous voyez toujours mes belles photos de road trip pensant que je vis une vie de rêve ici mais je l’aurai payé cher cette vie ! Mais maintenant je peux enfin en profiter car j’ai un an devant moi sans avoir à faire de ferme ! Je commence d’ailleurs un autre job très spécial dans une semaine mais ça je vous en reparlerai dans un autre article…
Bon courage à tous ceux qui font encore leurs fermes !